L'inspiration scripturaire dans le théâtre et la poésie de Paul Claudel

Des années troublées de Partage de midi à l'apaisement du Soulier de Satin, du drame personnel à la création d'un théâtre à l'état naissant, puis d'un théâtre total, la lecture de la Bible apparaît d'abord comme une tentative de voir clair en soi, de sonder l'incohérence d'un moi livré à une double passion, charnelle et mystique. Claudel cherche le sens de sa confrontation avec l'innocence de Dieu et le désir de la femme. Il interroge ensuite les Écritures pour découvrir un sens à sa vie, pour se convaincre que les souffrances de l'amant et les échecs du diplomate, tant en Europe qu'en Chine, étaient nécessaires pour faire de lui le créateur d'un univers de l'imaginaire. Il interroge aussi la stérilité et les contradictions de son époque qui a vu, à partir des enthousiasmes révolutionnaires, le triomphe de l'affairisme et l'humiliation du spirituel, lorsque le Turelure conquérant de L'Otage s'est mué en un vieillard rapace sans pitié pour les siens, acculant au meurtre du père son fils qui détruira une autre image de la paternité en la personne du pape.
Et ainsi, ce qu'il nous offre n'est rien moins qu'une réécriture de la Bible, une Bible du 20ème siècle. L'imprégnation est telle que le référent scripturaire naît sous sa plume, si fondu dans son texte qu'il n'en semble pas conscient. Il fait siens les schémas bibliques et liturgiques qui donnent à Tête d'Or son élan dramatique, fournissent aux Odes le canevas d'une création consciente et savante, offrent aux oratorios le patron à partir duquel le scénario se construit. Son œuvre en devient, comme l'Ancien Testament, un dialogue entre Dieu et son élu, où les autres ne sont pas oubliés et comme les Évangiles, le récit d'une vocation de salut où la victoire naît de l'échec et la vie de la mort.

L’inspiration scripturaire dans le théâtre et la poésie de Paul Claudel

Jacques HOURIEZ

LA BIBLE DU SIÈCLE NOUVEAU ET LES « REGARDS EN ARRIÈRE »

I. La Bible du XXème siècle

A. Vers l'élaboration d'un langage nouveau

1. Quand l'homme est à la fois l'instrument et l'archet

2. L'Or, ou connaissance intérieure que chaque chose possède d'elle-même

3. Le cantique de Marie et de la Sagesse

B. « L'Esprit et l'Eau », ou l'unité fécondante de la création et du créateur 

1. Le cercle et la semence

2. La clôture de l'Amour

3. La pénétration de l'Esprit

C. « Le Magnificat » ou la création d'un langage

D. « La Muse qui est la Grâce » ; un langage lyrique nouveau 

E. L'imprégnation biblique dans « La Maison fermée »

F. Le Processionnal pour saluer le siècle nouveau, ou la poésie du réel quotidien

G. Le drame personnel revécu à la lumière de la Bible

• Une imprégnation profonde, mais discrète

• Le poids du destin

• « Le péché n'aura pas d'empire sur vous, puisque vous n'êtes plus sous la loi, mais sous la Grâce. »

- Conclusion

II. Des Cinq Grandes Odes et du Partage de midi au Soulier de satin : L'intrusion de la réalité historique et sa transfiguration sous le regard de l'éternité

A. La lecture biblique de la réalité concrète, historique avec la « Trilogie », quotidienne avec les « Hymnes » de Corona..., familiale avec L'Annonce faite à Marie 

1. L'Otage, ou la tragédie du choix impossible

a) Sygne aux glaces du passé

b) La bénédiction du Père

c) La réclamation de l'âme

- Conclusion : la lecture biblique de l'histoire

2. Le rôle de la Bible et de la liturgie dans l'appréhension du vécu quotidien

3. L'Annonce faite à Marie, ou les deux versants du drame claudélien

a) Le rachat du péché

b) L'ouverture de la brèche

c) Le sacrifice de la Femme

d) Le sacrifice de la Mère

B. Le double regard de Claudel sur la réalité impitoyable et sa future glorification

1. Le Pain dur, ou la mort apparente 

a) La vraie vie est absente

b) L'espérance enragée 

2. Le Père humilié, ou la Nouvelle Alliance

a) L'âme désirante

• La fécondité des ténèbres 

• Le refus de la lumière

b) La rencontre des Amants

c) L'imprégnation biblique 

3. La Cantate à trois voix : L'adaptation de l'inspiration biblique à la nouvelle mystique claudélienne

a) L'abolition de la rose et l'effacement de la référence directe

b) La pénétration de la mystique johannique

c) La présence de l'Époux et la découverte de la terre divine

d) Vers Le Soulier de satin

III. Le Soulier de satin : L'affrontement de la violence et du sacré

A. La crise sacrificielle

1. L'humanité face au sacré

a) Le regard angoissé

b) Le regard agressif

c) Les eaux de la Grâce

d) L'inspiration scripturaire 

2. Le nouvel élu

a) L'homme de la piété et de la violence

b) Le triple bénéfice du sacrifice

- Conclusion : l'évolution de l'imprégnation biblique

B. Le regard en arrière : la contribution de la Bible à la lecture d'une vie

1. Le triomphe de la violence

2. L'appel du sacré

3. Le fil d'Anima

IV. Vers une solution du drame claudélien : Le dernier théâtre, Bible et dramaturgie

A. Le Livre de Christophe Colomb, ou l'image christianisée du double

1. La vocation du génie et sa justification

2. La tentation du désespoir

3. Les trois jours de la victoire sur la mort

- Conclusion : l'unité retrouvée

B. La double invitation au Banquet de la Sagesse

C. Jeanne d'Arc au bûcher, ou la révélation de l'être essentiel par le théâtre total

D. Le double aboutissement du drame claudélien

Conclusion 

L'option sacrificielle 

Du « mot que je suis » à la parole libérée

La lecture scripturaire

Abréviations

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Bibliographie

Table des matières